Moussa Sarr est pour le moins laconique quand il s’exprime sur son travail : “Très souvent, je joue avec ma propre image ; il s’agit de devenir un cliché pour tordre le cou aux clichés.” Il a finalement raison, ses images sont explicites, elles résistent d’ailleurs au bavardage. Si il est effectivement le sujet de ses photographies et de ses vidéos, l’artiste dépasse largement les problématiques généralement associées à la pratique de l’autoportrait (de l'autoreprésentation, de l'autofilmage, etc.) pour aborder un questionnement sur les stéréotypes et les préjugés raciaux, sociaux ou sexuels, l’exercice du pouvoir et les discriminations qu’ils supposent, un questionnement sur la morale et son principe simpliste de hiérarchie, un questionnement sur l’altérité qui le pousse à revêtir l’habit de celui dont il diffère, éventuellement de l’ennemi juré. “Blanc et noir”, “amour et haine”, “bien et mal”, “bourreau et victime”, “colonisateur et colonisé”, “appartenance et exclusion”, “singulier et générique”… pourraient constituer le début d’une liste de notions duelles que Moussa convoque et met en tension subtilement dans ses images, par le biais d’une iconographie identitaire abordée avec humour et autodérision. Edouard Monnet et Ian Simms |